La spirale du milan royal

Lorsque la chanteuse Joséphine Coll est engagée pour une série de concerts sur le Spirit of Ulysse, bateau de croisière en Méditerranée, elle embarque ses parents, Guillaume et Hélène, ainsi que son frère Alexandre. Car il leur est inconcevable de ne pas passer le 8 juillet ensemble, date anniversaire de la mort de Baptiste, fils aîné de la famille, ayant chuté lors d’une session d’escalade dans l’Ardèche, vingt-six ans plus tôt en 1998. En vacances sur le même bateau, un couple adultérin : après avoir imploré Cédric durant des années de quitter sa femme, Laure lui lance un ultimatum. Mais, le matin du quatrième jour, celle-ci se jette subitement à la mer.

Constatant l’impasse de l’enquête menée par l’inspecteur de police dépêché à bord, Joséphine, bouleversée par la mort de Laure, remonte le passé et ses propres souvenirs. Provocatrice au verbe cru, rock et corrosif, souvent drôle, parfois désespérée, mais si attachante, elle dynamite les hypocrisies de notre temps, dans la lignée de ses idoles – Janis Joplin, Patti Smith ou Chrissie Hynde. Tandis que Joséphine s’est évertuée à mettre à distance la tragédie familiale en menant une vie autodestructrice et marginale, Guillaume, son père, remonte lui aussi le cours des événements, mais avec douceur. Empreint d’empathie et d’humanisme, il n’arrive toujours pas à comprendre comment son fils Baptiste, excellent alpiniste, a pu commettre une telle erreur mortelle. Et, à la façon d’un escalier à double révolution, le récit effectue des spirales jusqu’au drame originel.

Dans ce roman à la construction parfaite et au style savoureux, Vincent Maillard pourfend les dérives de la société de consommation, la désinvolture des privilégiés, l’opportunisme et le sentiment d’impunité de politiciens. Il rend également hommage au courage d’une famille en deuil et au parcours de Joséphine, vulnérable malgré ses bravades, en quête d’une introuvable sérénité… Et si ces deux drames n’étaient pas étrangers l’un à l’autre ? Et si le cœur de l’énigme se trouvait dans les gorges de l’Ardèche, à la sidérante beauté ?